25 novembre 2008

Ford T 1926 - 07 : Centenaire et mise au point

Juin 2008. Deux événements sont au programme : la Locomotion en Fête à La Ferté Alais, et surtout le Centenaire de la Ford T à Sedan, dans les Ardennes. Pour la Locomotion, pas de problème particulier. Plusieurs amis sont venus : Christophe, Aubéri et Didier. J'emmène la Ford sur un plateau, tandis que les autres suivent avec mes deux 2CV, l'AU et l'AZ. L'ambiance est comme toujours très sympathique, nous y retrouvons pas mal de copains et nous campons sur place. Le point d'orgue est bien sûr la grande parade de fin de journée, sur la piste de l'aérodrome. La Ford T suscite bien sûr la sympathie, et nous passons un excellent week-end...

Deux semaine plus tard, c'est le grand départ pour le Centenaire de la Ford T. J'ai prévu de partir le vendredi 27 juin, très tôt. La veille au soir, je commence à charger la Ford sur le camion. Je la démarre quand soudain, un sifflement strident s'échappe du moteur : la poulie du ventilateur est grippée, et c'est la courroie qui tourne en fumant ! J'ai changé la semaine précédente les paliers en laiton de cette poulie, et j'ai commis l'erreur de les graisser : il fallait seulement les huiler ! Me voilà parti pour un démontage nocturne du radiateur pour enlever cette poulie. Finalement, je parviens à la démonter, mais les paliers sont morts, baignant dans une espèce de pâte de limaille et de graisse... Bon, pas de panique, il y aura demain plus d'une centaine de Ford T à Sedan, et on trouvera bien une solution, Jean-Pierre Hombert, Le Docteur T, nous attend là-bas. Je prends donc la route le lendemain matin, emmenant Pierre, fringuant octogénaire qui a roulé toute sa vie en Ford T, et Modeste, qui les apprécie beaucoup.

Nous arrivons en fin de matinée à Sedan : une grande pelouse, au bord de la Meuse a été réquisitionnée : C'est le T-Village. J'y suis accueillis par Chantal et Jean-Pierre, à qui je fais part de mes déboires de poulie. Pas de problème, il en a une toute neuve, et montée sur roulements étanches. C'est peut-être pas d'origine, mais c'est un soucis en moins... Après un petit casse-croute, nous nous mettons au travail : démontage du radiateur et de la poulie, remontage, il y en a pour une demi-heure. Sauf... sauf que nous n'arrivons pas à retrouver l'écrou de serrage de la poulie. Il est peut-être tombé dans l'herbe ? Nous reculons la voiture et nous cherchons à quatre pattes, centimètre par centimètre... Ça n'est pas possible, il ne peut pas avoir disparu ! Et c'est un écrou spécifique, nous n'en avons pas d'équivalent. Ah ! Ça y est, après une bonne demi-heure de recherche : il était posé sur le bord du moteur, sous la boite à bobine... En fin d'après-midi, nous nous rendons au château de Sedan, imposante forteresse où a lieu le premier rendez-vous. Une partie a même été aménagée en hôtel de luxe et c'est là que nous dormirons chaque soir.

Le samedi 28 juin, départ assez tôt pour Charleville-Mézières. Il y a deux groupes de Ford T qui prennent deux itinéraires différents, histoire de varier les plaisirs. Rouler à la campagne, à son rythme est un véritable bonheur pour le conducteur de Ford T : pas de feu rouge, pas d'arrêt intempestif, bref, on se laisse couler le long de la route, en admirant le paysage... Il y a bien un petit crachin qui tombe, mais c'est sans conséquence. Les habitants se rassemblent devant leurs maisons pour voir : ça n'est pas tous les jours qu'on voit passer autant de voitures quasi-centenaires. Il y en a plus de 130 ! Seul « arrêt » qu'on pourrait qualifier d'époque, nous sommes obligés de stopper pour laisser passer un troupeau de vaches qui rentre au champ. À Charleville-Mézières, rassemblement sur la magnifique place Ducale. Tout va bien, les deux camions plateaux d'assistance arrivent à vide, il n'y a pas eu de panne.

L'après midi, les choses sérieuses commencent : départ pour la Belgique vers Bouillon. Ça monte sec. La Ford souffre un peu : sa carrosserie est assez lourde et le moteur est en rodage. Comme disent les anciens, il tourne "dur" ! Jean-Pierre nous a prévenu. après Bouillon, il y a une montée très difficile sur plus de trois kilomètres. Certains s'arrêtent pour laisser refroidir un peu, pas nous... Car là, c'est vrai que ça monte très sec ! Plusieurs virages s'enchainent, nous laissant penser à chaque fois que le haut de la montée est proche. Nous sommes obligés de rester en première, et ça chauffe ! Le radiateur bouillonne un peu en laissant échapper de la vapeur... Soudain, alors qu'on arrive justement en haut, CLAC ! CLAC ! CLAC ! CLAC ! Quelque chose a cassé dans le moteur. Je ne cherche pas à savoir, j'avance encore de quelques mètres pour me garer en sécurité. Dans ce cas, une seule chose à faire, s'arrêter, et ne pas chercher à continuer. Ça ne peut qu'amplifier les dégâts...

Nous faisons le point avec Modeste : dans le meilleur des cas, il s'agit d'une bielle qui a lâché et, peut-être le vilbrequin qui s'est cassé ? On en a vu continuer à tourner même en deux morceaux... Sagement, nous prévenons l'assistance et nous attendons la dépanneuse, assis au soleil, en regardant passer les autres participants, un spectacle bien sympathique au final ! De retour à Sedan sur un plateau, Jean-Pierre vient voir ce qui s'est passé. On démarre le moteur quelques secondes et son diagnostic est immédiat : « C'est une bielle. Tu as bien fait de t'arrêter de suite. Je vais la ramener à Stenay et démonter. On verra bien ! En attendant, tu peux prendre mon coupé pour continuer ! » Je n'en demandais pas tant. Curieusement, cet incident ne m'embête pas trop. Nous ne sommes qu'à 60 kilomètres de Stenay, ça aurait pu se produire beaucoup plus loin et dans de moins bonnes conditions. Et puis, il y a finalement des choses plus graves dans la vie, l'automobile ancienne, ça doit rester un loisir et un plaisir !

La balade du lendemain se fait en France, et nous visitons quelques belles vallées. Un arrêt casse-croute à lieu à Stonne, un petit village au sommet d'une butte où ont eu lieu de durs combats en 1940 : Nous sommes sur le théâtre de la "percée de Sedan", l'offensive allemande du 10 mai 1940, et la région a beaucoup souffert. Modeste et moi nous partageons le Coupé Ford avec beaucoup de plaisir : sa légèreté et la souplesse de son moteur sont bien agréable. Nous avons le plaisir de voir arriver Jean-Philippe, un ami belge venu de Mons nous dire un petit bonjour au volant de sa Morgan. Il monte avec moi, et découvre lui-aussi les joies de la Ford T. Modeste, qui a pris sa Morgan, nous chronométre à 80 kmh dans certaines descentes !

Ces trois jours de plaisir, immergé dans le monde de la Ford T prennent fin le dimanche midi lord d'un repas de gala, et nous revenons vers Paris, sans la Ford, laissée à Jean-Pierre. Il regardera ce qu'elle courant juillet. J'en profite pour demander quelques travaux supplémentaires : reculer la banquette au maximum, car l'habitacle est vraiment étroit, monter la roue de secours sur le marchepied et fabriquer deux petites banquettes latérales à l'arrière... Et puis, à Sedan, nous avons découvert le "Silk Road" (Route de la Soie) de Jean-Marie Frisque, une sorte de roadster fabriqué par Jean-Pierre suivant ses désirs : imaginez une Ford T rapide, construite pour suivre la Croisière Jaune ! L'engin est léger, rapide, dépouillé au maximum, très sympa. On en parle à Jean-Pierre et à Jean-Marie : ça serait vraiment bien d'en faire une série du même genre, à partir d'épaves. Jean-Pierre est partant, reste plus qu'à trouver les bases, des épaves de Ford T. Modeste me rassure : le temps qu'il répare la camionnette, on devrait trouver ça.

À la fin du mois d'août, la camionnette est prête. Le moteur est réparé, c'était effectivement une bielle dont le régule s'était « décollé » : comme nous n'avons pas insisté, le vilbrequin n'a pas été marqué. Sylvain, le fils de Jean-Pierre a fait les travaux de menuiserie : l'habitacle a notamment gagné 12 cm en profondeur. Je charge chez Modeste à Merry sur Yonne un chassis complet de Ford T et l'équivalent d'un second en pièces détachées, et me voilà parti pour Stenay le lundi 14 septembre... Le lendemain, la Ford T est de retour à Paris. Une première balade jusqu'à la réunion Gazoline du mois d'octobre me permet de constater les progrès du moteur, mieux rodé : j'arrive à monter toute la côte de Marly près de de St-Germain en Laye en seconde, alors que j'étais obligé de rester en première au mois de mars... Seul problème récurent, le radiateur qui fuit de plus en plus. C'est plus spectaculaire que dramatique, puisque le circuit n'est pas sous pression, mais bon, il va falloir trouver une solution !

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